Que peut bien vouloir dire dans cette approche aider chacun à devenir Sujet ?
L'objectif de l'institution peut-il être de rendre les personnes accueillies Sujets ?
La vie est constituée de séparations. La naissance est la première de ces séparations que l'humain ait à vivre. Vient ensuite la prise dans le symbolique (langage) qui est une deuxième naissance.
Les résidents internes par exemple, pour la plupart ,cette famille est la première institution instance séparatrice qu'ils ont rencontré( le père fait tiers entre la mère et son enfant qu'il soit réellement présent ou présentifié dans la parole de la mère).
Ces mêmes familles ont eu à gérer le handicap comme elles ont pu et avec toute la souffrance et les difficultés que cela comporte, elles ont pu faire face mais d'autres non plus que dénier , surprotéger.
Le placement à ensuite éloigné le résident de sa famille, placement qu'il n'a pas choisi mais dont il a été objet, dans un établissement puis dans un autre. Quand il arrive à l'institution le résident arrive avec son histoire ,avec son lot de séparations réussies ou non.
Il est dans un processus d'individuation séparation qui constitue sa dimension de Sujet. Il est indispensable de considérer cette réalité dans notre accompagnement.La prise en compte de ce processus réclame de tous les professionnels une constante vigilance. En effet le handicap met les résidents dans une situation de dépendance qui réclame des gestes quotidiens visant à compenser cette dépendance.
Sans y prêter attention., elle peut installer une forme d'assistanat où le professionnel est tout pour l'autre, où il est supposé tout faire, tout savoir, où il agit pour combler le manque en se faisant "les bras et les jambes" de l'autre.
Et il y a une façon d'être sans cesse dans le faire qui met le professionnel en position d'objet. À l'inverse il y a une façon de ne pas tenir compte de la parole du résident dans le cadre de cette aide au quotidien qui rend le résident objet: Objet de la volonté du professionnel,objet de soins, objet de la gestion de la structure.
Le handicap crée une situation particulière qui installe entre le résident et le professionnel des dépendances où la place du sujet est en danger. Cela réclame une mise en travail permanente de cette situation pour qu'une relation de Sujet à Sujet s'instaure.
Il y a par exemple une façon de dire non qui positionne le résident en objet d'un arbitraire et il y a une façon de dire non qui le situe comme pleinement sujet , Sujet séparé, non confondu avec la situation d'aide qui lui est nécessaire.
Tout comme il ne s'agit pas d'identifier le résident au signifiant handicap( car il ne dit pas tout son être, tout comme ma validité ne dit pas tout mon être) il faut surtout le considérer en tant que personne avant tout, tout en tenant compte de son handicap. Une relation de Sujet à Sujet , génératrice d'altérité. Cette altérité marque la séparation: Je ne suis pas l'autre alors qu'il est mon semblable, l'autre ne peut combler le manque qui me constitue alors que je vais vers lui.
L'altérité dit la distance qui ne peut être comblée entre une personne et une autre. On ne peut pas être, sans être séparé, sans perte, sans deuil. Devenir Sujet c'est apprendre à se séparer. Et l'institution est le tiers nécessaire qui favorise cette altérité. Il ne peut y avoir de parole que s'il y a du tiers: L' outil qui fait tiers entre un professionnel et une personne accueillie: C'est le contrat( notion juridique où le contrat noue deux individus).
L'institution est donc aussi une instance séparatrice qui permet l'émergence du Sujet. Et pourtant l'institution peut devenir aussi ce qui empêche le Sujet d'advenir au point qu' on a l'impression d'un combat permanent entre l'institution et l'émergence du Sujet. Cela donne l'impression qu'une certaine forme de chaos, de désordre, d'imprévisible est nécessaire.
Il y a une mise en tension entre l'institution et le Sujet. Pour que du Sujet émerge en institution, il faut que l'institution accepte d'être dérangée qu'elle reconnaisse ses ratages, (elle aussi pour être adulte doit avoir "son moins") .
Ce qui empêcherait cette émergence du Sujet :ce serait les oppositions, les conflits, l'égoïsme, les trucages de la parole, la toute-puissance, ne pas reconnaître les limites et les manques.
L'institution suffisamment bonne est donc à la fois celle qui instaure un ordre symbolique qui fait tiers tout en faisant en sorte que les choses ne soient pas trop figées et qu'une souplesse soit possible. Une institution telle qu'une Maison Spécialisée dans l'Accueil de personnes en situation de handicap crée une situation où sont ensemble des personnes très demandeuses de par leur dépendance et des personnes très répondeuses de par leur validité et leur mission. La question de la réponse aux demandes recoupe celle du comblement au manque. Sans un travail permanent sur cette question, une maison d'accueil spécialisée est dans le risque qu'il n'y ait pas de place pour le Sujet.
1.6.La morale et l'éthique: Vouloir vivre avec les autres passe par une connaissance et un respect d'un ensemble de règles. La morale est ce qui fait référence aux règles(règlement, législation), quand plusieurs personnes vivent dans le même espace. La morale édicte des règles, qui permettent de vivre avec mes semblables.
Ce qui fait lien est la similitude avec le risque d'évacuer tout ce qui ferait différence, altération du même. La morale appartient à la logique du Sujet selon la conscience. Le fait qu'il y ait des règles permet d'éviter l'arbitraire. La morale, les règles sont la trousse à outils du professionnel, cela fait tiers dans la relation et lie la parole du professionnel à autre chose que son caprice, sa toute-puissance, son désir ,c'est une garantie qui arrache l'humain d'une simple logique du vivant pour l'introduire dans l'ordre du langage. On ne peut évacuer la morale sauf à la voir surgir autrement. (arbitraire, violence) .
Plus fortement l'éthique ouvre à la division du sujet, à dire au Sujet de l'inconscient, elle fait référence à la loi symbolique (interdit d 'inceste). L'éthique réclame de chacun de se mettre à l'écoute des mots qu'il utilise au point d'entendre sa propre façon d'habiter les mots. Par exemple dans le quotidien le professionnel peut se trouver dans une situation où il doit appliquer la règle pour ne pas laisser l'autre dans une illusion mais l'inscrire dans du symbolique. ("non ça tu ne peux pas le faire, ici c'est interdit c'est une RÈGLE")
Mais si on se situe par rapport à l'éthique la question devient:
Qu'en est-il de ma propre position par rapport à cette RÈGLE ? Comment je la fais VIVRE ? Comment moi je suis convaincu du bien-fondé de ce que j'énonce comme étant une RÈGLE?
Comment je suis moi-même TRANSCENDÉ par ces règles ?
Je peux être dans la morale sans être dans la force de mon être Sujet garant de la loi. L'éthique relève d'une intime détermination. Elle traduit ma propre façon de me situer par rapport à l'autre, ma capacité d'y reconnaître l'Autre, ce qui s'est manifesté que ce n'est pas tant de mon désir dont il s'agit mais de ma capacité à faire vivre l'altérité qui me constitue.
La parole on l'a vu est au centre de tout ce qui nous humanise . L'éthique viens travailler à l'endroit de notre propre rapport à la parole. On sait combien la parole est malmenée par la vie groupale ou par l'imaginaire individuel.
Être soucieux d'éthique s'éveiller à établir en soi et pour les autres une rigueur de parole, une recherche constante d'authenticité pour dire JE au plus près de la réalité qui nous anime, pour dire Tu par une écoute bienveillante. Il n'y a pas circulation de la parole sans une quête éthique individuelle et collective. Le souci éthique fait de la relation à l'autre non pas un lieu de conflit mais un lieu d'énonciation.
On est dans le #?qu'est-ce que tu me veux ? #ou encore'' qui es-tu toi pour me dire CELA ? # de quelle place me PARLES-TU ? # qu'est-ce qui t'autorise À ? #
Il va y avoir alors de la parole entre ces DEUX-LÀ, de la confrontation d'un désir à un autre DÉSIR, une vraie rencontre entre deux SUJETS.
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